En Afghanistan, une guerre sans fin a commencé il y a presque deux décennies lorsque les États-Unis ont occupé le pays, au lendemain du 11 septembre 2001, après les attaques terroristes perpétrées par des membres d’Al-Qaïda. Ces derniers avaient été hébergés par les talibans. Donald Trump avait fait campagne pour mettre fin à ces « guerres sans fin » et a fait, de la conclusion d’un accord avec les talibans, une de ses priorités de politique étrangère de sa campagne de réélection de 2020.
Or, coup de théâtre, hier samedi, un accord historique visant à mettre fin à la plus longue guerre des États-Unis a été signé à Doha au Qatar. Cet accord qui a été régularisé en la présence du secrétaire d’État Mike Pompeo, l’envoyé spécial américain Zalmay Khalilzad et le chef politique des talibans, Mollah Abdul Ghani Baradar permet le retrait des troupes américaines d’Afghanistan. En contrepartie, les talibans s’engagent à ne plus autoriser que le territoire Afghan puisse être utilisé par des terroristes pour attaquer les intérêts américains. En dépit de l’espoir que suscite cet accord, le chemin qui reste à parcourir pour atteindre la paix dans ce pays reste long. Avant tout, il s’agira pour les Talibans d’entamer des pourparlers avec le gouvernement du Président Ghana.
Cet accord de Doha a été signé uniquement après un accord de « réduction de la violence » d’une semaine qui prévoyait une trêve partielle. Un cessez-le-feu complet devra suivre à l’issue des négociations intra-afghanes qui devront débuter le 10 mars prochain. L’accord prévoit également que les États-Unis devront lever leurs sanctions à l’encontre des Talibans et soumettre une résolution devant l’organisation des Nations Unies portant sur la levée des sanctions du Conseil de sécurité contre les Talibans.
Les stipulations de l’accord prévoient, de surcroit, que Washington devra réduire, dans un délai de 135 jours, le nombre de 12 000 soldats américains actuellement en Afghanistan à 8 600. L’accord prévoit aussi que les troupes américaines restantes ne seront engagées que dans le combat contre des groupes terroristes tels qu’Al-Qaïda ou encore l’Etat islamique. En plus de la présence militaire américaine, il convient de rappeler que l’OTAN compte environ 16 000 soldats en Afghanistan. Ces troupes devront également graduellement se retirer du territoire Afghan.
L’accord prévoit en outre, en cas de respect de leurs engagements par les talibans, un retrait total des troupes américaines dans un délai de 14 mois. Les Talibans ont également pris l’engagement de ne pas coopérer avec les groupes ou les individus qui menacent les États-Unis.
Cet accord marque également le commencement des pourparlers visant à réconcilier les talibans avec le gouvernement légitime afghan du Président Ghani. Une libération de prisonniers a été également prévue et devra servir de marque de bonne volonté de la part des uns et des autres avant le début des pourparlers intra-afghans. Ainsi les talibans libèreront environ 5000 militaires gouvernementaux et ce dernier, en contrepartie libèrera 1000 combattants Talibans. Cette libération effective interviendra dans un délai de trois mois à compter du 10 mars, date du début des pourparlers inter-afghans.
Ces discussions inter-afghans ne manqueront pas de s’avérer particulièrement difficile du fait de la répulsion des talibans à s’asseoir à une même table avec les représentants d’un gouvernement qu’ils n’ont cessé de qualifier de marionnette des États-Unis. Par ailleurs, les contestations qui ont suivi les élections afghanes de septembre 2019 vont encore compliquer l’entente à venir. En effet, alors qu’il y a peu, le président Ashraf Ghani a été déclaré vainqueur, son principal rival, Abdullah Abdullah, conteste toujours les résultats des élections. Ce dernier a même revendiqué la victoire tout en promettant de former son propre gouvernement.
Une déclaration commune a clôturé la cérémonie de signature. Cette déclaration conjointe affirme que les États-Unis et le gouvernement afghan sont « déterminés à travailler ensemble pour parvenir à un accord de paix global et durable qui met fin à la guerre en Afghanistan au profit de tous les Afghans et contribue à la stabilité régionale et à la sécurité mondiale ».
Ce qui est certain c’est que l’intégration des talibans dans le gouvernement, pour le cas où ils interviendraient, signifiera un recul certain des droits des femmes et des autres minorités dont les chiites et Tadjiks persanophone.
Par Ardavan Amir-Aslani.
Paru dans l’Atlantico du 01/03/2020.