L’Iran à l’heure du choix

Avec une économie en lambeaux et la perte de ses alliés, le pays ne semble pas avoir d’autre option que d’aller vers un accord global avec Washington

En cet anniversaire de la victoire de la révolution iranienne, certains ont pu être flattés par la récente déclaration de Donald Trump qualifiant l’Iran de pays puissant. Mais cette déclaration ne saurait convaincre ni la population iranienne, qui croule sous la pression économique, ni les partisans de l’Iran à l’étranger, qui voient la puissance de leur pays se réduire suite aux récents bouleversements régionaux.

En effet, l’économie iranienne a connu une de ses pires années en 2024, une année tragique pour la population. À l’étranger, d’un point de vue géopolitique, l’ensemble des proxys iraniens a été profondément affaibli. Le leadership du Hezbollah a été décimé, la Syrie de Bachar Al-Assad est entre les mains d’un islamiste fanatique de Daech, et la bande de Gaza a été réduite à un champ de ruine.

Crédibilité internationale affaiblie

Avec la perte de ses alliés, la crédibilité de l’Iran a été fortement fragilisée. Il n’est plus possible pour l’Iran de renflouer en arme le Hezbollah par la voie terrestre. Par ailleurs, ses moyens financiers limités lui interdisent désormais d’assurer le financement de ce mouvement ; chacun sait que faute de ressources financières, les allégeances peuvent rapidement basculer. Le président libanais, voyant le vent tourner, s’est rendu le lendemain de son élection en Arabie saoudite pour prêter allégeance au régime saoudien et solliciter son aide financière.

Le prestige de Téhéran dans le monde arabe a été réduit à néant. La lamentable fuite de Bachar Al-Assad à Moscou a mis un terme définitif à l’influence de Téhéran dans la région, qui se voit remplacé très rapidement par ses ennemis saoudiens et turcs. Tout l’argumentaire fondé sur le combat mené à l’extérieur de ses frontières afin de ne pas être contraint de combattre ses ennemis à l’intérieur du pays s’est écroulé.

Désastre économique

Cette situation de fragilité, vue de l’Ouest, va inciter les Américains et les Européens à augmenter la pression sur l’Iran afin de mettre le pays à genoux. Le mécontentement de la population iranienne, de par le désastre économique que connaît le pays, ajoute un élément supplémentaire à sa fragilité.

En effet, sur le plan domestique, l’insatisfaction de la population s’est fait entendre. Des coupures massives de courant dans les mégapoles iraniennes en un hiver particulièrement rude, l’arrêt des usines du fait des mêmes coupures et une devise qui dégringole face au dollar, atteignant une parité jamais constatée jusqu’ici, traduisent la détresse économique du pays, qui recèle pourtant les premières ressources gazières et les troisièmes gisements d’hydrocarbures au monde !

Et pire encore, avec un tiers de la population vivant sous le seuil de la pauvreté, c’est l’espoir des jours meilleurs qui disparaît désormais. Jamais le rêve de quitter le pays n’a autant habité la jeunesse iranienne.

À l’Est, point de salut

Face à cette situation critique – pour ne pas dire dramatique – loin de se complaire dans la flatterie de Trump, le pouvoir iranien ne peut que se rendre compte qu’il n’y a point de salut à l’Est, la Russie et la Chine n’étant que des mirages. Pékin vient en effet de réduire ses achats du pétrole iranien de 25 %, diminuant les exportations du pays de 1,5 million de barils. Les promesses non tenues de la Chine d’investir de centaines de milliards de dollars dans l’économie du pays, ou de la Russie d’apporter son soutien militaire, doivent faire réfléchir Téhéran. Le pays ne semble pas avoir d’autres choix que celui d’aller vers un accord global avec Washington, acceptant des restrictions sur son programme nucléaire militaire ainsi que l’effritement de son pouvoir dans la région, ceci en échange d’une levée des sanctions américaines.

Maelström moyen-oriental,
Ardavan Amir-Aslani
publié sur Le nouvel Economiste le 13/02/2025

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